Mémoire et identité

Le décès du pape Jean-Paul II a déclenché des mouvements de peuples que l'on n'avait jamais vus dans l'histoire semble-t-il. Et les médias se sont surpassés en intensité dans l'abondance et la qualité des reportages et des commentaires. Oui, le monde a besoin de personnalités dotées de ce calibre, à la bonté qui transcende les frontières, aspirant à ce point les bonnes volontés. Puisse ce rayonnement étendre le règne du Christ sur le globe, par une abondance de prières, durant au-delà d'une trop courte fête, par une ferveur poussant les fidèles à remplir les églises et à pratiquer l'observation des sacrements.

Certaines manifestations se sont signalées sous l'égide de la laïcité, excluant toute mention d'une religion quelconque : selon Paul Valéry, nier A, c'est montrer A derrière une grille. Or on a vu en ces jours l'éclat de la toute puissance divine.

Cela dit, l'homme, créé à l'image et à la ressemblance de Dieu, en porte la marque, et Jean-Paul II fut saisi dès sa jeunesse par la transcendance de l'homme. On trouve dans son livre : Mémoire et identité, paru chez Flammarion (pp 186-187) un texte significatif :

 

Je t'appelle et te cherche, Toi

en qui l'histoire des hommes peut trouver son Corps.

Je vais vers Toi et ne dis pas: « viens»

mais simplement : « Sois. »

Sois là ou rien n 'est inscrit dans les choses

mais où autrefois il y eut l'homme,

ou il fut âme, cœur, désir, douleur, vouloir,

consumé d'amour et brûlant de honte sacrée.

Sois l'éternel sismographe de l'invisible Réel.

O Homme, en qui l'abîme en nous rejoint la cime,

en qui l'intime n'est point fardeau ni ténèbres

mais seulement cœur.

Homme, en qui tout homme peut trouver le dessein de

son être le plus profond

et les racines de ses actes : miroir de vie et mort,

solidement enraciné face au flux humain.

Homme, toujours à toi je parviens, passant à gué

le faible fleuve de l'histoire,

allant a la rencontre de chaque cœur, de chaque pensée (histoire - tassement de pensées, mort des cœurs)

je cherche ton Corps dans toute l'histoire.

Je cherche Ta profondeur.

Et à la page suivante, Jean-Paul II arrive à une grande conclusion :

Voici donc la réponse a la question cruciale : le sens le plus profond de l'histoire va au-delà de l'histoire et trouve sa pleine explication dans le Christ, Dieu-Homme. L'espérance chrétienne se projette au-delà des limites du temps. Le Règne de Dieu se greffe et se développe dans l'histoire de l'homme, mais son but est la vie future. L'humanité est appelée à avancer au-delà des frontières de la mort et même au-delà de la succession des siècles, vers le port définitif de l'éternité, auprès du Christ glorieux, dans la communion trinitaire. «Leur espérance est remplie d'immortalité » (Sagesse 3, 4).

On ne peut manquer d'être saisi par la profondeur de ces développements. Et lui-même, il a incarné si on ose le dire, cette conception, ce qu'ont bien perçu les innombrables participants à ses obsèques le 9 avril 2005. Qu'importe, à première vue, si cela renverse d'un seul coup les affirmations séculaires de plusieurs énoncés. Le Christ n'est pas seulement le rédempteur des hommes, selon le Credo de Nicée, mais le Rédempteur de l'Homme, selon l'encyclique Redemptor hominis.

Evidemment, le culte de l'homme semble se profiler, l'homme-idole en somme, évoqué avec insistance par Paul VI dans un discours célèbre.

Une précision :

L'enfer est un dogme de foi divine et catholique. Un épiscopat entier, celui de France, le conteste ouvertement depuis 1978 : "Des évêques disent la foi de l'Église", où le chapitre sur l'enfer est de Mgr Favreau, qui sera par la suite évêque de Nanterre. Extrait : "Voir dans l'enfer un châtiment que Dieu infligerait à quelqu'un qui, conscient de ses fautes, ne s'en repentirait pas, est

I N A C C E P T A B L E."

Le refus est clair; il est public . Il est repris dans certaines homélies.

En général, la notion même d'enfer est absente des prédications, et on peut observer que l'eschatologie de Jean-Paul II citée ci-dessus ne mentionne pas ce me semble ce qui nous attend tous : le jugement dernier (Math. 25, 31-44).

Il faut se souvenir du fait que la Vie trinitaire : Père, Fils, Saint Esprit, préexiste à celle du genre humain, et que l'homme vient après, après la chute, par l'Incarnation rédemptrice, par Marie Médiatrice de toutes grâces . Identifier la Seconde personne de la Trinité à l'Homme ne me paraît pas convenable.

On peut attendre non sans anxiété la suite des événements, l'élection d'un pape d'envergure comparable, reprenant la tiare au sens propre sinon au figuré pour entraîner les ferveurs vers la vie éternelle, suscitant de saints prêtres élevant le Corps et le Calice admirables, et enseignant les commandements : l'adoration, la piété, la fécondité, la pureté, le sens de la propriété, le partage, en un mot les devoirs de l'homme avant ses droits.

Subjuguant les turpitudes bestiales qui empuantent le globe, luxure, usure, avortement, pédophilie, viol, violence, terrorisme. L'Europe sodomisée, enviolentée, ensocialisée. Puissent notamment les nombreux jeunes vus à Rome se tourner résolument vers des voies dignes : ''Heureux les coeurs purs, car ils verront Dieu''.

Texte paru dans Le Temps

Le 8 avril 2005

À contre-courant, Jean Paul II ?

Marie-Hélène Miauton

La ferveur et l'affliction de millions de personnes a travers le monde lors de la mort du pape Jean Paul II nous interpellent sur la façon dont cet homme a su rassembler les âmes et réconforter les esprits, tout en étant, apparemment du moins, à contre-courant de son siècle. Convaincu de la capacité des hommes à dépasser leur condition, il a prône la fermeté au lieu de la facilité. À l'heure du laisser-aller libertaire, quel défi!

Face au laxisme des mœurs, et malgré le sida, il a réaffirmé que la sexualité n'a de sens que dans l'amour et non comme simple mécanique de plaisir. A l'heure du matérialisme à tous crins, quel courage exemplaire. Pèlerin infatigable, il est allé tout autour du monde attester sa foi et la présence de l'Église. À l'heure ou trop de chrétiens répugnent à témoigner et où l'évangélisation a mauvaise presse, quel disciple il sut être! Malgré l'œcuménisme ambiant, il a renoué avec un respect du dogme dont la rigidité a surpris. À l'heure ou chacun se sent libre de choisir à la carte ce qui lui convient dans l'offre des religions, quelle indispensable remise au pas. Devant les guerres actuelles qui confrontent manifestement les religions, il a rassemblé à Assise les principales croyances sans qu'il se soit agi pour autant d'un happening fusionnel. À l'heure de l'affadissement culturel, quelle ouverture aux autres, mais dans l'affirmation claire de ses propres valeurs. Profondément atteint dans sa santé, il a assumé publiquement son corps défaillant, induisant ainsi que ce n'est pas la dignité de l'homme qui est altérée par la maladie ou par le grand âge mais son enveloppe charnelle seulement. À l'heure ou la pyramide des âges s'inverse, quel symbole!

C'est ainsi que Jean Paul II a donné une leçon d'exigence morale aux hommes, de détermination apostolique aux pasteurs, d'espérance aux jeunes et de courage aux vieillards. En tous ces domaines, il fut à contre-courant du discours dominant, d'où son étiquette de conservatisme. Mais plus il allait a contrario de son temps, plus ses inconditionnels augmentaient, tant il est vrai que la rigueur et la cohérence induisent le respect et l'amour! L 'incroyable popularité de ce pape démontre que ce n'est pas lui qui était à contre-courant mais plutôt notre époque tout entière, elle qui va à l'encontre du bon sens et de la vérité, ce pourquoi elle crée tant d'insatisfaits et de malheureux. Partout, dans les familles comme a l'école, en politique comme en religion, le laxisme l'emporte sur l'autorité. Les jeunes en particulier, qui n'ont vécu que dans cette ambiance, attendent désormais qu'on leur demande un effort plutôt que de les entretenir dans la médiocrité, et ils rêvent de dépassement de soi. Les chrétiens veulent qu'on leur rappelle la parole de Dieu dans toute sa fermeté, même si elle est difficile à suivre. Les citoyens veulent qu'on leur offre des perspectives d'avenir et non des statu quo médiocres...

En clair, ce que Jean Paul II a défendu avec calme et cohérence, et qui a tant plu aux hommes et aux femmes de toutes les religions et de toutes les races qui l'entendaient, n'était-ce pas la seule parole vraie dans un monde qui se fourvoie? Ayant su utiliser les moyens de communication de son époque pour faire passer un message éternel, tous l'ont donc cru moderne à cause de la forme. Et si c'était à cause du fond?

mh. miauton@bluewin.ch

Le lion de Münster

Voici une nouvelle réconfortante. Le cardinal von Galen, le "lion de Munster", sera bientôt béatifié à Rome. Ennemi implacable de l'idéologie national-socialiste, il se dressa comme une colonne de feu devant Hitler, et ne se couchait pas comme un chien comme tant d'autres!

Voici les faits. En 1940, au moment où l'Allemagne fut envahie par la folie des grandeurs, quand ses soldats se ruèrent vers les limites de l'Europe, Hitler s'attribua la mission d'un héros, voire d'un Messie de la mort: "J'en finirai avec les maladies incurables, en exterminant les malades incurables!" De toute l'Allemagne, discrètement, des bus remplis de handicapés physiques et mentaux affluaient vers des cliniques spéciales au cœur de l'Allemagne en n'y laissant pas de trace.

Hitler suivait à la lettre les conseils d'une autre malade mentale, Madame Margret Sanger en USA, fondatrice du Planning Familial mondial, qui prônait depuis longtemps l'extermination de "la vie inutile et dépravée". Hitler traduisait: "menschenunwertes Leben".

Mais un homme se dressa sur sa route à Munster dans le nord de l'Allemagne, bastion catholique dans une mer protestante: l'archevêque Clemens August von Galen. Il fulminait, pendant ses sermons de l'été 1941, du haut de sa chair dans la vaste cathédrale de Munster: "Euthanasie ist Mord!" (l'euthanasie est un meurtre), et prêchait contre la persécution des religieux par les nazis. Et chaque sermon terminait par ceci: "Je sais que le NKWD est ici pour m'espionner; ils n'ont qu'à m'arrêter à la sortie!" Aujourd'hui encore on se souvient de la parole prophétique prononcée lors du sermon historique du 3 août 1941: "Maudits soient les hommes et le peuple allemands si nous cassons le saint commandement: 'Tu ne tueras pas!'. Malheur sur nous, le peuple allemand, si nous ne permettons pas seulement cette offense haineuse, mais la laissons impunie".

Hitler, connaissant l'immense prestige de cet homme, ne l'a jamais fait arrêter. Le programme d'euthanasie a été stoppé fin août 1941. En 1944, le cardinal se dressa de la même façon contre la persécution des juifs, voire en 1946 contre les abus des forces d'occupation. Pie XII le nomma en février 1946 cardinal "pour son courage héroïque". Après un retour triomphal à Munster il est décédé un mois plus tard. C'est aussi cela, l'époque nazie en Allemagne. Avec 2 ou 3 cardinaux de ce gabarit, l'assassinat de millions de bébés en Europe - "menschenunwertes Leben"? - s'arrêterait. Prions ce futur saint afin qu'il sauve d'en haut l'Allemagne et cette Europe, occupées par de nouveaux "tyrans de la mort"

UNION DES NATIONS DE L'EUROPE CHRETIENNE (UNEC) - ROME:

Le Mea Culpa du cardinal Ratzinger

Il a "médité", devant des milliers de pèlerins venus pour le Chemin de Croix du Vendredi Saint au Colisée, à la 9ème station: "Ne devons-nous pas penser également à ce que le Christ doit souffrir dans son Eglise elle-même?... Combien de fois ne célébrons-nous que nous-mêmes, et ne prenons-nous même pas conscience de sa présence!...Quel manque de foi dans de très nombreuses théories, combien de paroles creuses! Que de souillures dans l'Eglise...Combien d'orgueil et d'autosuffisance!"

Ensuite il a prié (malheureusement en tutoyant liturgiquement Notre Seigneur): "Souvent, Seigneur, ton Eglise nous semble une barque prête à couler, une barque qui prend l'eau de toute part. Et dans ton champ, nous voyons plus d'ivraie que de bon grain. Les vêtements et le visage si sales de ton Eglise nous effraient. Mais c'est nous-mêmes qui les salissons! C'est nous-mêmes qui te trahissons chaque fois, après toutes nos belles paroles et nos beaux gestes.

Prends pitié de ton Eglise: en elle aussi, Adam chute toujours de nouveau. Par notre chute, nous te traînons à terre, et Satan s'en réjouit... Kyrie eleison!" -

Quel aveu! Un bilan de la situation catastrophique de l'Eglise actuelle? Un chant de cygne devant un pape alité, impuissant, réduit au silence? Une Eglise "prête à couler"? - Reprenons un par un les sujets en cause: le cardinal, le pape, l'Eglise. Le cardinal se frappe la poitrine, et il a raison: il est une homme qui voit, mais n'agit pas. Par rapport à son niveau dans l'Eglise, c'est fantastique, inouï, fatal, et les mauvais fruits de cette léthargie n'ont pas fini de surgir. Des millions ont perdu la foi, désaffecté l'Eglise, tourné le dos. Non pas qu'ils seraient devenus athées, ils sont simplement devenus mous, neutres, "tolérants", absents. "Dieu? Ce n'est pas ma préoccupation, Monsieur!"

Bien sûr, le cardinal n'est pas le pape, mais il pouvait par exemple faire la grève de la faim devant les appartements du pape, pour attirer son attention sur l'état d'extrême urgence de l'Eglise. Pourquoi ce sont toujours les petits fidèles qui doivent se ruer dans le combat, risquant renommée, fortune, parfois leur vie? Pourquoi un cardinal ne peut pas risquer sa position, en s'avançant fermement vers celui qui pourrait redresser le gouvernail, le pape? Non, il ne l'a pas fait. Il a regardé, pleuré, écrit, oui, mais il n'a pas agi.

- Et le pape? Avec un revers de main, une rapide signature - une bulle d'excommunication - il a éloigné des centaines de milliers de catholiques. Certes, il ne les a pas excommuniés, mais avec l'excommunication formelle des quelques évêques de la tradition, le mal était fait, la confusion s'est créé, et des milliers et milliers se voyaient, du jour au lendemain, jetés dehors, pestiférés, excommuniés, et les évêques ordinaires étaient bien les chefs de cette diffamation affreuse dans l'Eglise, presque partout. Celui qui a signé cette bulle d'excommunication porte une responsabilité terrifiante dans cette déchirure du Corps Mystique du Christ. Nous ne pouvons que prier afin qu'il ne paraisse pas devant le Juge Eternel avant que ce malheur soit réparé. Aujourd'hui il est trop tard pour lui pour annuler oralement l'excommunication, même vite faite lors d'un Angelus à la fenêtre du Vatican.

Le pape n'a plus de voix. Comme Zacharie. Il ne lui restent plus que les tablettes de cire. - Et l'Eglise? Oui, elle chavire. Les prêtres et fidèles de la tradition avaient tiré les sonnettes d'alarme en temps voulu, depuis 40 ans, personne ne voulait les écouter. Pire, on les a fait taire, sinon tués. Aujourd'hui le pape est impuissant, la tempête rugit, des cardinaux se frappent la poitrine, le mal dans l'Eglise devient à tel point évident que plus personne ne peut plus s'y tromper. Mais la tradition reste impitoyablement excommuniée. Bref, tout est prêt pour une immense rénovation, une résurrection, un nettoyage à fond. L'Esprit Saint interviendra - combien de fois dans l'histoire de l'Eglise déjà? - au moment crucial pour sauver son Arche, donner un bon Pasteur, redresser le gouvernail et moissonner enfin l'immense champ de blé qui attend sur la terre. Oui, Kyrie eleison! Maranatha! - (ru; ZEN 28.3.)

 

- PAQUES: La liturgie chante du fond de la nuit pascale: "Dux vitae, mortuus, regnat vivens" (Le Prince de la Vie, mort, règne vivant.) Jésus, flagellé et couronné, Pantocrator! - Nous souhaitons à tous une sainte et joyeuse semaine de Pâques 2005 ! - L'équipe de rédaction. RU (UNEC).

 

Le communisme mal nécessaire

Le 16 octobre 2004 à Francfort sur le Main (Allemagne) lors de la Foire internationale du Livre, le directeur de la salle de presse du Saint-Siège, M. Navarro-Va1s annonçait la sortie pour le printemps 2005 d'un nouvel ouvrage du Pape Jean-Paul II

" Mémoire et identité'' , édité en Italie par Rizzo1i.

Deux passages de cette œuvre ont été diffusés à ce moment et ont retenu l'attention passagère des médias (un survol comme d'habitude). On y lisait une réflexion d'après 1945 portant sur les deux régimes politiques qui ont marqué le XXe siècle, le nationa1-socialisme et le social communisme. Au sujet de ce dernier, le Saint Père note : " il m'est apparu tout de suite que le communisme durerait plus longtemps que le nazisme. Combien de temps ? Difficile à prévoir. Mais assez vite on devait réaliser qu'en quelque sorte ce devait être un mal nécessaire au monde et à l'homme. Il arrive dans certaines circonstances concrètes de l'existence humaine qu'un mal soit utile, utile en cela qu'il crée des ''occasions pour le bien ". Ce passage se termine par cette affirmation. St Paul , quant à lui enseigne à ce propos :

" Ne vous laissez pas vaincre par le mal mais soyez vainqueurs du mal par le 'bien " ( Rm 12, 21)

" On pouvait s'attendre à ce que l'expression ''communisme mal nécessaire" fasse le tour du monde et qu'on soit amené à conclure que si une chose est utile et nécessaire, elle n'est donc pas absolument mauvaise, donc elle est bonne. Est-ce vraiment cela ?

Avant de poursuivre il faut faire deux remarques préliminaires :

Cela, par rapport à qui parle et ensuite par rapport à l'espace intellectuel dans lequel se situe la déclaration en cause.

Premièrement, cette déclaration n'est pas couverte par le munus du magistère pontificat. Toutefois elle n'est pas dénuée d'autorité une autorité qui découle de la doctrine et de l'expérience de sa source, donc d'un pontife philosophe, théologien, observateur et acteur d'une période historique donnée. Il n'y a rien de dogmatique dans ce passage mais il mérite a plus grande attention et la plus grande considération.

Deuxièmement, il faut écouter le philosophe et historien de l'Antiquité Giovanni Rea1e (qui enseigne aux universités du Sacré-cœur et de St Raphaël à Milan) : " J'ai été chargé de la publication de toutes les œuvres littéraires et philosophiques de Caro1 Wojti1a, ainsi que de l'édition commentée de son triptyque, cela aux Éditions Bompiani, et en ce qui concerne le livre qui va sortir chez Rizzo1i. Jamais je n'ai trouvé encore de pensée aussi fortement et clairement exprimée " . Il ajoute:

"Ici, le jugement du Pape n'est pas du niveau historiographique, mais plus élevé, c'est de la philosophie et de la théologie de l'histoire "

Je me place donc sur ce plan de la philosophie et de la théologie de l'histoire et je fais trois observations :

a) la première vient du communiste italien Gramsci (1891-1937) selon qui la ''phi1osophie de la praxis" (c'est ainsi que le penseur sarde appelait le matérialisme dialectique et historique ") présuppose tout ce passé culturel ,la Renaissance et la Réforme, la philosophie allemande et la révolution française, le calvinisme et l'économie classique anglaise, le 1ibéra1isme laïc et l'historicisme qui est a la base de toute la conception moderne de la vie. La philosophie de la praxis est le couronnement de tout ce mouvement de réforme intellectuelle et morale(...) Elle correspond à la connexion Réforme protestante + Révolution française ."

b) la deuxième est tirée de la déclaration " Nous sommes témoins du Christ qui nous a libérés " rendue publique le 13 décembre 1991 par l'assemblée spéciale pour l'Europe du Synode des évêques qui s'est déroulée au Vatican du 25 novembre au 14 décembre 1991. On y lit : '' Aujourd'hui en Europe le communisme comme système s'est écroulé. Cependant subsistent ses blessures et son héritage dans les cœurs des personnes et dans les nouvelles sociétés en émergence. Les personnes ont des difficultés dans l'usage de la liberté et du régime démocratique ; les valeurs morales subverties doivent être ravivées". Et encore ceci : "La chute du communisme met en question tout l'itinéraire culturel et socio-po1itique de l'humanisme européen marqué par l'athéisme non seulement dans son débouché marxiste et montré dans les faits, au-delà de tout principe, que l'on ne peut pas détacher la cause de Dieu de la cause de l'homme

c) Enfin, je reprends un passage de Jean Paul II : ''La chute du communisme ouvre devant nous un panorama rétrospectif sur la façon d'agir et de penser spécifique de la civilisation moderne et particulièrement et européenne, qui a donne naissance au communisme ."

Donc, il est évident que le communisme n'est pas ( en s'exprimant informis) " nécessaire par nécessité métaphysique" mais " nécessaire par nécessité morale ", nous dirions historique ". Posé cela et en excluant des interventions extraordinaires et miraculeuses, les conséquences sont inévitables et dans ce sens, certainement nécessaires.

J'ai parlé de nécessité morale Et je pars de cette nécessité pour illustrer un autre genre de nécessité qui lui est corrélative, une autre perspective qui permet l'emploi de l'expression '' mal nécessaire '' en générai et spécialement à propos du communisme .

On se réfère ici au destin éternel des individus et au destin historique des groupes humains que l'on appellera ''nations'' sans pour autant faire allusion d'abord à l'idolâtrie nommée nationalisme.

Les individus naissent ,vivent ,meurent, ont un destin éternel, passant ainsi de la vie à la Vie . Les nations ont seulement un destin historique . Leur horizon est seulement immanent ; si l'on parle à leur propos de " paradis '' , de " purgatoire " ou d' "enfer'', ce ne sont que des métaphores. Cela dit de telles métaphores sont indicatrices d'un état de réalité , souvent dramatique, relié à la " récompense '' à la ''faute " ,à la " punition ".

C'est pourquoi leurs actions sont récompensées et punies dans ce monde, cette récompense et cette punition sont intrinsèques à leur existence à leur unique forme terrestre d'existence , alors que les agents peuvent venir du dehors mais pas seulement.

Chacun connaît l'expression évangélique ''sufficit diei ma1i tia sua '' ( à chaque jour suffit sa peine ) à laquelle correspond (logiquement mais pas philologiquement évangélique) un " sufficit diei 1aetitia sua gaudium suum " ,chaque jour peut avoir son bonheur, sa joie. C'est un fruit possible , pas nécessairement " in hac 1acrimarum valle '' (dans cette vallée de larmes) d'une action juste et correcte . Dans ce sens le penseur colombien Nicolas Gomez Davi1a (1913-1994) a pu soutenir que '' le monde moderne ne sera pas puni "

''Il est punition " Il ne sera pas puni parce que Dieu serait injuste mais parce que chaque conduite contraire à sa loi mène intrinsèquement au malheur . Ergo , toujours dans cette perspective, le communisme devient le châtiment nécessaire, précisément le ''mal nécessaire '' qui découle d'un comportement erroné, d'une " erreur fondamentale (..,) de caractère anthropologique''

"Donc, le communisme est un mal doublement nécessaire : nécessaire comme conséquence de bases erronées, d'une conception erronée de l'homme et nécessaire comme punition intrinsèque et historique d'une telle conséquence . Nécessaire en tant qu' ''uti1e", c'est-à-dire cohérent avec la logique du bien de l'économie divine, utile pour démasquer l'essence du mal de tout le processus qui y a conduit .

Exactement comme dans la vie d'un homme ,la souffrance, si elle est punition du mal, peut être " utile'' parce qu'elle démasque la nature du mal des actes qui l'ont produit .

Parler donc du communisme en tant que " bien à construire'' comme le fait M. Bertinotti ,secrétaire du Parti de la Refondation communiste, est " .diabolico persevare ". Une telle proposition confirme que non seulement la doctrine l''' errare humanum est", mais l'expérience qui en dérive, l'histoire elle-même ne peut pas être magistra vitae.

Le mépris pour les conséquences est aussi mépris pour leur caractère déduit "operari sequitur esse" sorti de la dialectique ,dans le même temps constructiviste et utopique.

En fait, pendant une émission télévisée consacrée au texte pontificat, l'homme politique communiste a évoqué implicitement Kar1 Marx (1818- 1883) : " La révolution tend à liquider la philosophie et encore plus la théologie'', faisant écho aux thèses sur Feuerbach (1804-1872) de Marx : "Les philosophes ont interprété le monde de diverses manières. Il s'agit maintenant de le changer ". Donc de le rendre encore une fois historiquement invisible, en quelque sorte, en institutionnalisant les conséquences du péché originel.

Giovanni Cantoni

Traduit de l'italien par Denis Helfer

 

 

Forteresse en Chine

Telle une étoile brillante dans la nuit, une forteresse surnaturelle se dresse en Chine Populaire où une vingtaine de moines trappistes prient jour et nuit, l'abbaye "Notre Dame de la Joie" dans les collines de l'île Lintao. C'est le seul monastère contemplatif en Chine, avec un abbé chinois Dom Clement Kong consacré le 25 janvier 2005. Ces trappistes se lèvent à 3h 1/2 pour chanter les Matines dans la chapelle surplombant la baie de Hongkong, à l'heure où le calme se répand un peu sur le nouvel aéroport international de Hongkong sur la même île, à 10 kilomètres de là. Ensuite une contemplation silencieuse de 30 minutes, dans l'obscurité totale. Il est bon de savoir que, bien avant que le vie survoltée de Hongkong se lève, des moines sont déjà debout pour adorer Dieu là où il ne semble pas y avoir de place pour Lui. A peu d'exceptions près, ils sont tous chinois, mais chinois du grand nord. Exactement de Pékin où l'on parle de mandarin, à ne pas confondre avec le dialecte de Hongkong et Canton. Ce sont surtout des vieux chinois - à commencer par le Père Nicolaus 108 ans - , car le monastère fut d'abord érigé, en 1928, dans la province Hebei dans le nord du pays. Mais la guerre civile entre les communistes et les nationalistes a obligé les 77 trappistes en 1948 à fuir vers la province méridionale Szechuan. Deux ans plus tard la République Populaire Chinoise a été proclamée, où il n'y avait pas de place pour les trappistes. Des hordes de jeunes ont envahi et brûlé le monastère "Notre Dame de la Joie", et 33 moines furent martyrisés. En 1951 une vingtaine ont finalement réussi à s'échapper vers Hong Kong, trois étant déguisés comme soldats de l'Armée populaire communiste, un quatrième se comportant comme malade mental. Les autres furent jetés en prison. Quelques survivants ont été libérés dans les années quatre-vingt et ont rejoint la nouvelle fondation à Hongkong. On se souvient de la "reddition" scandaleuse de Hongkong, par les Anglais en 1997. Quelques anciens du monastère furent pris par un tremblement incontrôlable à la seule mention du mot "communisme". Il était question de fuir vers Taiwan. Finalement ils prirent la décision de rester sur place, sous la seule protection de Dieu et de la Sainte Vierge, leur patronne. Leur bail de location de 1951 avec le Gouverneur britannique, 20 HK$ (2 E) par an pour chacun des 73 hectares de leur terrain quasiment inaccessible sur Lantao, est toujours valide et respecté à la lettre. Ils ont mis laborieusement sur pied une société florissante dans le lait, les légumes et les biscuits, selon leur culture scientifique traditionnelle. Mais ce ne sont plus les moines qui vont traire les vaches, activité entre temps déplacée vers la plaine toute proche, plus propice à l'élevage du bétail et la culture de la terre. Aujourd'hui ils gardent toujours une part de 30 % dans cette société localisée à Canton, ce qui leur procure assez pour vivre (l'abbé parle de 20.000 HK$ = 2000 E par mois pour faire fonctionner le monastère), voire pour aider quelques prêtres de l'Eglise catholique des Catacombes dans le reste de la Chine. La communauté souffre surtout d'un âge moyen très élevé, le plus jeune des moines ayant 44 ans et l'âge moyen étant de 77. L'ordre trappiste, ou cistercien, fut fondé il y a plus de neuf siècles par Saint Robert, en 1098 à Cîteaux en France, qui voulait faire revivre l'esprit initial de la règle de St Benoît. L'ordre compte aujourd'hui 2500 moines en 95 monastères autour du globe, et 65 couvents avec 1500 religieuses. Le Père économe est Frère Grégory, un des rares moines venus directement de Hongkong. Il était auparavant homme d'affaire en important des machines industrielles légères d'Europe vers la Chine et passait 6 mois par an à Pékin. Aujourd'hui il balaye les couloirs du monastère et prie Dieu. Chaque moine dispose comme seule propriété de 2 habits religieux, et leur cellules blanches, à sol de ciment, comportent chacune simplement un lit, une toilette, une table et une chaise, en attendant à l'extérieur le tombeau avec une croix blanche sans nom. Les repas sont simples et sains pour ces hommes de prière et de travail: riz avec nouilles et légumes, rarement de la viande. Le téléviseur - un seul pour toute l'abbaye - n'est allumé que 3 fois par an pour une vidéo Walt Disney, et pour les émissions où le Saint Père est annoncé. Les vocations sont devenues extrêmement rares, en dépit de plusieurs SOS envoyés par le Père abbé à la chrétienté. Le communisme athée n'étant pas venu à bout de "Notre Dame de la Joie", est-ce que le monde d'argent d'aujourd'hui y parviendra? Il est vrai que les moines ont accéléré cette tendance, certes en sainte obéissance, en acceptant sans broncher les nouvelles directives liturgiques et autres du Concile Vatican II. Le latin fut sacrifié sur l'autel du Mandarin, le Grand Silence au moloch de la "communication interpersonnelle devenue nécessaire aujourd'hui" (sic l'abbé), la sainte liturgie elle même fut dramatiquement modifiée en la simplifiant, écourtant, banalisant, sinon humanisant. On se souvient de l'église St Ignace à Tokyo, à l'université jésuite Sophia, où le Père Bitter S.J. racontait au début des années 60: "Jusqu'à ce que nous ayons changé de liturgie, à chaque messe je voyais, tout à fait au fond de notre église, un groupe de vieux japonais. qui ne faisaient que regarder, sans bouger. Quand je leur demandais la raison de leur venue quotidienne, ils m'ont dit: 'C'est merveilleux, nous ne pouvons assez contempler ces gestes éternelles de votre liturgie, mille fois célébrés, rayonnant une paix indicible, surhumaine. C'est plus fort que toutes nos cérémonies de thé, de Nô et de méditation: votre liturgie est du domaine divin! En plus ces mots d'éternité que vous semblez prononcer...' Eh bien, la liturgie moderne a fait table rase de tout cela, et mes vieux japonais ne viennent plus". - Si vous vous sentez une vocation d'aller dans les collines de Lantao, d'intégrer l'abbaye "Sainte Vierge de la Joie" et prier Dieu en pleine Chine communiste, et même peut-être d'y faire resurgir une nouvelle vie en essayant d'y réintroduire peut-être l'attrayante et sainte liturgie de St Grégoire, adressez-vous sans tarder au Frère Théophane, île de Lantao, courriel tmanas@hotmail.com. Peut-être vous répondra-t-il illico: "Ora et labora - usque ad mortem", le saint adage des bénédictins, trappistes et cisterciens catholiques. - (ru; cf. N.D.B. 17.1.04, A.N.I. 25.1.04, YABO 3.3.04). - - ORA ET LABORA - -

 

Lettre d'un embryon

MONDE : Une lettre est tombée du Ciel sur notre table de rédaction. Voici le texte : "Je suis un embryon. En guise d'accueil par l'humanité, une course fatale aux obstacles s'impose à moi dès le débat. A peine conçu, une 'pilule du lendemain' risque d'étouffer ma croissance et ma courte vie. Ensuite, après quelques semaines, une bombe chimique risque de m'exterminer : le RU 486. Supposons que même cet obstacle soit dépassé, voilà un couteau qui me coupe en morceaux, voire un aspirateur pour me déchiqueter, en laissant mon paisible domicile en atroce champ de bataille ; ou une solution saline qui me déshydrate sans merci, rendant mon petit corps ocre-noir en mourant de soif. Si par malheur ma maman fume, boit ou se drogue, ou couche avec des malades du Sida, je risque d'être marqué à vie d'une faiblesse incurable, sinon fatale. Si j'ai la malchance de naître en USA et une partie de mon corps est déjà sorti, on me fait imploser la tête en aspirant ma cervelle 'pour enlever la douleur à maman' (avortement dit par naissance partielle). Quand je n'ai pas encore ouvert les yeux, et si j'ai la malchance d'être une fille et de naître en Chine, je cours le risque d'être tuée tout de suite après la naissance n'étant pas le garçon souhaité. Une fois les yeux ouverts, si je suis né en USA, en Angleterre ou en Hollande, je risque de découvrir les grimaces de deux homosexuels jouant aux parents, m'empêchant pour le reste de ma vie d'entendre la douce voix de maman ; ou de voir les visages de deux lesbiennes penchées sur moi, me privant pour toujours de la ferme et nécessaire autorité de mon père. Si je me trouve comme orphelin en Russie ou Ukraine, je vivrai probablement en indigence absolue, l'État pouvant tout juste payer ses soldats et fonctionnaires. Puis, si j'ai la malchance extrême d'avoir été conçu 'in vitro' dans un labo, je risque à 95 % de probabilité, en tant que 'surnuméraire', d'être exterminé dans un four à gaz de l'hôpital, ou jeté dans une poubelle municipale, voire d'être utilisé comme 'pièce de rechange' obtenue par 'clônage thérapeutique' en faveur d'un frère ou d'une sœur plus chanceux, ou d'un vieillard riche souffrant de la maladie de Parkinson, ou même d'être transformé en crème cosmétique pour engraisser les rides d'une femme aisée. Et, devenu enfant et habitant en Irak, ou en Palestine, je me vois bombardé, voire mitraillé comme un lapin, sans aucune défense par les États Unis, les Nations Unies, l'Union Européenne ou d'autres champions des Droits de l'Homme. Le bébé que je suis, né de Dieu ? Qui m'aime sur terre ?" - (ru ; cf. RU40/2000) - - A.M.D.G. - -

 

Fêtes sans parlotte à la Sécu

C'était vraiment cette fois-ci une belle fête et sans parlotte, entendons pas même une parlotte avec un brin d'utilité. La fête a pris place il y quelques mois, mais du fait du black-out de la grande presse elle vient d'être connue et cela vaut la peine de la conter tant elle est significative des jeux non innocents du tout de la République Fromagère ; elle rappellera faits plus anciens, rien ne bougeant jamais en France au niveau de l'État.

A Pékin en septembre 2004, simultanément avec la sortie de la non-réforme de l'assurance-maladie, 180 dirigeants français des caisses de protection sociale ont séjourné, aux frais des moujiks contribuables, dans les plus luxueux hôtels de la capitale de la Chine. Motif : participer à l'assemblée générale de l'association internationale de sécurité sociale. Un millier de délégués représentaient 130 pays dont 30 Allemands, 25 Américains, et pas moins de 180 français. à croire que la France est fière de cette incroyable et honteux étalage de l'exception française : 180, cela fait 18 % des heureux fêtards internationaux.

Le premier jour, les travaux ont été ouverts à 15h30 pour se terminer par un cocktail à 18 h : l'horaire n'était pas harassant Les jours suivants 13, 14, 15 et 16 septembre ont été réservés à des réflexions techniques, ce qui a permis aux congressistes, peu intéressés par ces parlottes, de s'exfiltrer discrètement pour visiter la cité interdite. De même, n'était-il pas nécessaire de consacrer son après-midi du 17 à suivre l'exposé sur la sécurité sociale chinoise. Enfin, les débats, qui devaient en principe se clore le 18 ont pris fin la veille pour être sûr de ne pas trop se fatiguer les congressistes.

Le coût officiel du séjour des quasi-fonctionnaires de la sécurité sociale française était de 700 000 euros. Pour bien apprécier ce gâchis qui n'a été révélé que peu à peu, voici de nouveaux éléments. D'abord le coût officiel, le coût sec si l'on peut dire, se réduisait aux billets d'avion et frais d'hôtels. Mais à toute dépense étatique il faut appliquer un multiplicateur élevé pour arriver au coût réel. En effet, les structures publiques, quelles qu'elles soient, sont foisonnantes : pyramides et fouillis d'organismes, accumulation d'échelons, pléthore de parasites, alors que les structures privées par définition et obligation cherchent l'efficacité. Le coefficient cinq est assez approprié pour rendre compte du foisonnement et cela donnerait 3 600 000 euros ou 23 616 000 francs pour cette scandaleuse fête à Pékin.

Voici un autre élément. Il y a plusieurs années, pendant les grèves de 1995, alors que précisément touts les forces vivantes de la nation souffraient gravement de ces grèves voulues par les « branches mortes » que sont les syndicats, la même fête avait eu lieu dans un autre pays d'Asie. Le black out de l'information sur ce scandale avait aussi joué dans la honte pour les journalistes de la grande information : ce n'est qu'après la fête et la fin de la grève que la nouvelle avait filtrée. Il n'y avait eu alors « que » 115 fêtards venant de France ! Et enfin dernier élément.

Quand une firme privée se livre à une grande parlotte accompagnée d'un peu de fête, c'est avec un objectif précis d'amélioration des affaires pour mieux servir les clients et ceci dans un climat concurrentiel. Ici rien de tel. La sécurité sociale est un organisme monopolistique évoluant dans un contexte de terreur légale et sous l'étroite tutelle conjuguée du pouvoir et des syndicats non représentatifs : il n'y a aucun espoir de perfectionnement quelconque à espérer d'un tel déplacement périodique et les congressistes n'avaient aucune chance de faire quelque travail utile. C'était la fête sans parlotte, la fête à l'état pur.

Michel de Poncins

lundi 7 mars 2005

 

Thierry Breton :

Les pauvres mangeront des statistiques

La paupérisation croissante de la France vient de s'exprimer dans la rue. Thierry Breton comme on va le voir ne va surtout rien changer aux pratiques ordinaires. Un des mécanismes par lesquels les interventionnistes de tous partis développent l'effet de ruine, qui vient de s'exprimer ainsi, est la manipulation des compteurs dans laquelle il se lance avec allégresse

Les galaxies d'usines à gaz qui enchaînent la France comportent de multiples robinets et compteurs que les Hommes de l'État, que je dénomme couramment les « Hifis », manipulent en permanence pour prétendument corriger les calamités qu'ils ont eux-mêmes créées au nom de leur bon plaisir momentané et pour leur propre avantage. Une publicité récente énonce quelques mécanismes purement fiscaux applicables aux investissements immobiliers : Robien, Demessine, Girardin, Malraux, Monuments Historiques, LMP, LMNP. L'effet de pauvreté est directement généré par ces mécanismes : pyramide réglementaire avec contradictions permanentes, gaspillage de milliers d'heures de travail au détriment du travail utile, contentieux multiples et orientation de l'épargne d'une façon arbitraire et contraire aux indications que fournirait un marché libre.

Les auteurs des lois correspondantes en tirent un bénéfice considérable. D'abord ils justifient leurs fonctions abusives par la fabrication d'une loi : le premier souci d'un ministre inutile est de fabriquer une loi. Ensuite, s'ils obtiennent que dans le langage commun leur nom soit accolé à la loi, le bénéfice de la publicité correspondante s'étendra sur eux leur vie durant ; au prix qu'il faut débourser pour créer une marque de réputation soit nationale, soit internationale, chacun peut imaginer la valeur d'un tel logo sans jamais arriver bien sûr à le chiffrer et ce n'est pas son propriétaire qui nous renseignera.

Thierry Breton ne déroge pas, hélas, à la règle commune. Dès son arrivée il a accepté le diktat de Chirac qui veut augmenter les fonctionnaires pour acheter leur voix en vue du oui abusif qu'il souhaite obtenir le 29 mai ; simultanément le déficit va se creuser davantage et le chômage augmenter. S'il avait été sincère et sérieux, il aurait mis sa démission dans la balance et le couple Chirac-Raffarin aurait du capituler, ne serait-ce que pour éviter les quolibets internationaux. S'il n'a pas bougé, c'est bien qu'il est un fidèle sans conditions de l'interventionnisme étatique.

Il a aussi confirmé son adhésion au socialisme en annonçant deux manipulations de compteurs : des mesures pour pousser les entreprises à développer l'intéressement et d'autres pour prétendument encourager la recherche et l'innovation Mais, en plus, il annonce que la grande innovation va être la mise au point d'une batterie d'indicateurs sur lesquels il rendra compte régulièrement. Les Français auraient ainsi un tableau de bord qui serait comme une planche de salut quand le bateau coule.

Lisez bonnes gens, car cela vaut la peine. Voici une partie de la liste : nombre de naissances, évolution des dépenses de santé, offres d'emplois déposées à l'ANPE, prix d'un « caddie type », nombre d'accords d'intéressement dans les entreprises, demandes de brevets dans les entreprises françaises, nombre d'étudiants étrangers en France. Il faudra sans doute un mode d'emploi pour interpréter ce déluge de chiffres, car le sens dans lequel il faudra lire les variations pour se réjouir ou se lamenter n'est pas évident. Et puis comme, malgré toutes manipulations éventuelles, il est exclu que tous les compteurs soient au vert simultanément, il sera indispensable d'imaginer un système de coefficients savant et assez obscur pour être lui aussi manipulé. Ensuite l'inondation de statistiques meurtrières dont les entreprises sont les victimes ne fera qu'augmenter.

Enfin les mensonges vont se multiplier. Les indicateurs actuellement sacralisés comme le PIB ou le taux de chômage sont le centre de mensonges officiels célèbres. Toute cette horreur économique est parfaitement cohérente avec la Lolf, dernière invention des Hifis ou « Loi organique aux lois de finances » qui prétend donner des instruments pour juger les politiques publiques, tâche évidemment par nature impossible : c'est la cohérence dans l'incohérence. Faute de sortir à toute allure une loi Breton, le nouveau ministre veut peut-être créer les indicateurs « Breton » ou encore les indicateurs « T.B. », modeste suggestion que nous lui offrons comme un atout maître dans la communication ! Bon appétit aux français paupérisés : vous pourrez manger des statistiques dernier cri.

Michel de Poncins

Lundi 29 mars 2005