Atroces lumières

Le président Jacques Chirac a tenu récemment en loge un discours exaltant les vertus maçonniques : la liberté absolue de conscience, la liberté de douter, le doute étant le moteur du progrès ; l'essentiel est de provoquer et non d'imposer, de suggérer sans proclamer, d'interroger plutôt que de répondre, refusant les certitudes, dans la liberté de l'homme parvenu à s'affranchir tant des passions que des carcans sociaux, même au milieu des déchaînements de haine et de violence. Dès les tavernes des origines, les maçons ont contribué à diffuser les valeurs conduisant aux Droits de l'Homme et du Citoyen.

Quel beau portrait. Et le Contrat social de Rousseau condense cela, et mène à la démocratie, cette déesse des temps modernes, qui rend les forces proportionnelles au nombre (étourdiment selon Paul Valéry). Le nombre crée la vérité, la lumière.

Au Ruanda, dans les années 90, les Hutus, c'était le nombre. Les Tutsis, malgré leur valeur, c'était une minorité. Même des ecclésiastiques ont succombé aux charmes du nombre, aux Hutus

Au Rwanda, la relation entre le mouvement du Hutu power et les milieux gouvernementaux s'est avérée complexe, mais étroite. Même si elle fut parfois désavouée publiquement, la milice reçut l'appui secret - ou manifeste - de l'État. En fin de compte, le gouvernement a laissé se perpétrer le génocide et l'armée a pris une part active aux tueries massives. Les massacres, prémédités de longue date, furent l'aboutissement d'une campagne soigneusement orchestrée qui exploita systématiquement les failles de schémas d'identification et de dés identification préexistants et largement répandus, en évolution depuis au moins un siècle.

La France même n'est pas sans responsabilités, ayant favorisé le génocide, selon le président ruandais. Le Nombre a conduit donc à des atrocités (800.000 exécutions). Auparavant, il y avait déjà eu le génocide vendéen, les colonnes infernales, générant les révolutions du XIXe et du XXe siècles, le Goulag, etc.

Et l'Église affirmait les résistances des papes jusqu'à Pie XII, refusant les séductions des prétendues lumières : Pie XI considérait encore le caractère intrinsèquement pervers du communisme, mais, sous Pie XII, à l'insu de ce dernier, certains prélats traitaient avec Staline; le Concile Vatican II, ce séisme ecclésial, a ouvert les fenêtres aux ''fumées de Satan'', tarissant l'esprit de prière, la nécessité des conversions et les vocations. Jean-Paul II semble vouloir résister : on s'interroge. N'est-t-il pas en train de ''panthéoniser'' l'Église ? A-t-il été emporté par l'esprit de la ''nouvelle Pentecôte'', semblant peut-être jouer un jeu difficile?

Des esprits perspicaces, tels l'abbé Georges de Nantes (voir ci-dessous), Mgr Marcel Lefèvre, Michel de Preux et d'autres, ont émis des objections qu'on ne peut écarter ou ignorer et qui restent sans traitement, ou réponse. La situation est des plus confuses ; ''on fait avec'', se confiant à la volonté divine, essayant de prouver notre affection malgré tout à Jean-Paul II, cette personnalité hors pair.

Par ailleurs, la pratique délibérée des dix commandements dans l'esprit des béatitudes reste le fondement d'une civilisation. Soyons chastes, honnêtes, miséricordieux, véridiques en présence de Dieu !

Jean de Siebenthal

 

Abbé de Nantes

Une intelligence supérieure à notre point de vue, est celle du promoteur de la Contre-Réforme catholique, éditant chaque mois un fascicule d'une tenue spirituelle et intellectuelle impressionnantes.

''Qui est donc l'abbé de Nantes ? Georges de Nantes est né en 1924 et fut ordonné prêtre en 1948. Détenteur de quatre licences, il enseigna durant dix ans la philosophie et la théologie. Puis il fut nommé, à sa demande, curé d'une paroisse de campagne du diocèse de Troyes où, avec l'approbation de son évêque, il fonda une communauté religieuse, les Petits frères et sœurs du Sacré-Cœur (en français dans le texte). Dès le début du concile Vatican II, il détecta dans ses débats, et finalement dans ses décrets, des tendances qu'il jugea contraires à la sainte tradition et menaçantes pour l'orthodoxie doctrinale. À la fin du Concile, il prit une position publique d'insoumission et d'opposition aux décrets conciliaires, raison pour laquelle il fut "suspens" par son évêque et interdit de prêcher et de confesser. (Une mesure disciplinaire de cette sorte ne s'applique qu'à l'intérieur du diocèse où la sentence a été prononcée. Elle a un effet strictement local et n'a aucune force ailleurs.) Mais, comme l'a toujours maintenu l'Abbé, il semble bien que l'évêque était injuste en prenant une telle mesure puisque les décrets de Vatican II, tels qu'ils ont été promulgués, manquent des formules canoniques usuelles par lesquelles les actes conciliaires sont affirmés comme obligeant DE FIDE. En outre, Jean XXIII avait dit clairement dès le début que ce serait un Concile pastoral - quelque chose de tout à fait nouveau dans l'histoire de l'Église - ne se préoccupant pas de définitions doctrinales.

L'"orientation" des décrets de Vatican II fut inspirée, car vers cette époque mourut le bon pape Jean, par le pape Paul VI (Jean-Baptiste Montini), disciple du philosophe catholique libéral Jacques Maritain, dont l'Abbé déplore l'influence sur la pensée catholique contemporaine. Karol Wojtyla, le pape polonais Jean-Paul 11, s'est toujours proclamé lui-même disciple de Paul VI, dont il s'est engagé à poursuivre l'œuvre.

Les gravamina de l'abbé de Nantes contre le concile Vatican Il et contre les papes Paul VI et Jean-Paul Il sont clairement exposés par lui-même dans deux ouvrages : le Liber Accusationis primus (Paul VI) et le Liber Accusationis secundus (Jean-Paul II). On peut résumer ces accusations par ces paroles adressées à Jean-Paul Il « Il faut le dire en face : votre religion n'est plus celle de l'Église catholique romaine. Votre religion est la religion de l'homme qui se fait dieu et non la religion du Fils de Dieu qui s'est fait homme pour nous. » Autrement dit, la religion de l'humanisme laïque avec des apparences catholiques.

Se peut-il que cela soit vrai ? se demande-t-on en l'entendant pour la première fois. Cela semble improbable. L'abbé de Nantes n'est-il pas qu'un ecclésiastique excentrique ayant une idée fixe et un grief personnel ? On pourrait être tenté de le penser et d'écarter tout le dossier comme sans intérêt en dehors de France ; mais quand on prend la peine de lire les deux Libri Accusationis, il devient très rapidement clair qu'une telle explication ne tient pas. Chacun de ces documents est un réquisitoire réellement formidable que l'on ne peut écarter aussi facilement. Les accusations sont fondées sur les encycliques, allocutions et écrits théologiques et philosophiques divers des deux Papes, cités in extenso. Les deux ouvrages ont connu une très large diffusion et ont été édités en plusieurs langues : français, anglais, allemand, italien, etc.

Karol Wojtyla est philosophe de profession mais ses œuvres, du moins dans leurs éditions anglaises, sont d'une densité presque impénétrable pour qui n'est pas lui-même ou elle-même un philosophe de métier (et peut-être même pour certains d'entre eux ?). Mais cela n'a pas découragé Monsieur de Nantes d'étudier très minutieusement ces écrits, car il possède la formation et les moyens intellectuels pour le faire.

Les encycliques du Pape sont d'une lecture difficile et d'une longueur démesurée ; elles sont peu lues par le clergé comme par les laïcs. Cependant l'encyclique Laborem exercens a retenu pour une certaine part l'attention des intellectuels catholiques de gauche à cause de son thème. Le commentaire du quotidien catholique français La Croix en fut que l'histoire de la philosophie pouvait fournir des analogies frappantes avec la philosophie wojtylienne du travail, notamment dans les écrits de Marx et d'Engels. Un rédacteur de la revue Je suis Français a observé que les maîtres de Karol Wojtyla en philosophie sont surtout allemands : Kant, Fichte, Schelling, Hegel, Nietzsche, Feuerbach, Marx, Heidegger et Max Scheler. Or, on ne peut dire que chacun de ces philosophes ne puisse avoir quelque chose à nous enseigner, mais on ne sera certainement pas surpris qu'un auteur ayant de tels maîtres suive dans sa propre pensée une ligne manifestement humaniste et "immanentiste". Nous savons également que dans sa jeunesse précléricale Wojtyla fut fortement sous l'influence de 1"'anthroposophie" de Rudolf Steiner, et plus tard de la pensée de Teilhard de Chardin. Un brouet. plutôt enivrant ne pouvait manquer d'être le produit de toutes ces influences.

Citant toujours ses références, afin que chacun puisse vérifier ses dires, l'Abbé accuse encore Jean-Paul Il de détruire l'unité de la foi ; et, à travers une nouvelle doctrine de la "collégialité", d'affaiblir la structure hiérarchique de l'Église. En outre, sa doctrine des "droits de l'homme" se conforme aux principes de 1789 et aux doctrines de la Révolution française, idées jusqu'ici toujours réprouvées et condamnées par l'Église.

Une autre accusation est que le Pape a approuvé et encouragé un profond changement dans la compréhension traditionnelle de la Messe.

Ce n'est pas le lieu ici de commenter ces accusations ; en tout cas, n'étant ni philosophe ni théologien de profession, je préfère ne pas le faire. Ce que je peux dire cependant, c'est que, ayant étudié soigneusement le premier et le second Liber Accusationis, je trouve difficilement compréhensible que l'on ne voie pas que l'Abbé soutient légitimement une puissante cause qui exige une réponse.

Des accusations très semblables ont été lancées dans la solennelle mise en garde (en français dans le texte) adressée au Souverain Pontife par l'archevêque Marcel Lefebvre et l'évêque Antonio de Castro Mayer à l'occasion du synode extraordinaire des évêques réuni à Rome en 1985. Lefebvre représente des milliers de catholiques traditionalistes à travers le monde ; de Nantes plusieurs milliers en France et au Canada principalement. Il existe un certain nombre d'autres groupes traditionalistes plus petits, dont certains sont des sédévacantistes endurcis, c'est-à-dire qu'ils croient que le Pape actuel est tellement éloigné de la foi orthodoxe qu'on ne doit plus le considérer comme Pape. L'Abbé et l'Archevêque sont tous deux fortement en désaccord avec cette position. L'Abbé émet certaines réserves sur le mouvement de Mgr Lefebvre, principalement du fait que l'Archevêque ordonne de nouveaux prêtres traditionalistes et consacrera peut-être un autre évêque pour assurer la succession après sa mort. De Nantes estime que ce sont des actes contraires au droit canon authentique. Dans sa propre communauté, il dispose d'un certain nombre de jeunes hommes qui ont achevé leurs études sacerdotales et pourraient raisonnablement être présentés à Lefebvre pour recevoir l'ordination. L'Abbé a préféré qu'ils attendent jusqu'à ce qu'enfin la position de son mouvement, La Contre-Réforme Catholique (en français dans le texte), soit régularisée.

La découverte, ou la prétendue découverte de temps en temps d'un enseignement hétérodoxe dans les déclarations des Papes ne devrait surprendre personne. Les déclarations pontificales marquées du degré de solennité qui est reconnu jouir de la protection divine contre l'erreur sont d'une extrême rareté. Elles ne se rencontrent pour ainsi dire jamais dans les allocutions et lettres encycliques. La seule chose surprenante dans ce contexte est la proportion et la fréquence des propositions peut-être erronées.

La façon dont le Vatican a choisi de traiter l'affaire est spécialement intéressante. Rien n'en est pratiquement paru dans la presse anglaise laïque ou religieuse.

Le Pape n'a personnellement prêté aucune attention officielle à l'acte d'accusation de l'Abbé, dont des copies ont été remises à tous les cardinaux de Curie. Les deux volumes de cet acte d'accusation ont connu une immense diffusion à travers le monde et la plupart des évêques ont vu au moins le second d'entre eux. Le Pape est demeuré silencieux, et aucun cardinal, évêque ou autre théologien ne s'est présenté pour proposer une réfutation pour le compte du Pape. Pourquoi ? Les accusations sont si graves et sont maintenant si largement connues, malgré le silence du Vatican, qu'une réponse est absolument nécessaire si l'on ne veut pas que la réputation du Pape souffre davantage.

Mais, bien qu'aucun essai n'ait été tenté pour réfuter les accusations de l'Abbé, diverses mesures ont été prises contre Monsieur de Nantes personnellement, mais elles ne sont pas allées jusqu'à l'excommunication. On se demande de nouveau pourquoi ? Vraisemblablement parce qu'il ne pourrait pas être excommunié aujourd'hui sans le procès qui convient et que le Vatican doit avoir peur de l'impression que l'Abbé ferait sur le grand public devant un tribunal ecclésiastique. Non seulement il possède un esprit très pénétrant et un grand savoir, mais c'est également un orateur puissant et éloquent.

Ainsi l'Abbé n'est-il pas excommunié ; mais en 1969, le Saint-Office l'a déclaré "disqualifié": une sanction jusqu'alors inconnue du droit canon et que son destinataire décrit comme une « sanction exorbitante du droit, sportive plutôt qu'ecclésiastique ».

Entre 1978 et 1983, de Nantes a envoyé une série de lettres au Pape, et puisque aucune réponse n'avait été reçue du Vatican à la moindre d'entre elles, leur texte fut rendu public. Puis, le 25 mars 1983, l'Abbé écrivit pour informer le Saint-Père que le 13 mai il se présenterait lui-même, en compagnie de deux ou trois membres de sa communauté et de quelques autres amis, à la porte de Bronze du palais du Vatican afin de remettre au Pape, juge suprême en matière de foi et de morale, ou à son représentant accrédité, un exemplaire du second Liber Accusationis, ainsi qu'une demande pressante de l'étudier et de rendre en temps voulu à son sujet un jugement officiel.

Quand arriva ce jour, l'Abbé et ses disciples ne furent pas admis à rencontrer le Pape mais furent reçus par le cardinal Jérôme Hamer, dominicain, secrétaire du Saint-Office (maintenant camouflé sous le nom de Congrégation pour la doctrine de la foi). Le cardinal refusa d'accepter le volume présenté, même un exemplaire pour la bibliothèque du Saint-Office (mais on sait qu'un exemplaire s'y trouve maintenant). Le secrétaire dit alors à l'Abbé, tout simplement, qu'avant de pouvoir être reçu officiellement, ou pris en quelconque considération, il devait d'abord rétracter toutes ses erreurs. Or, quelque temps avant la nomination du cardinal Hamer comme secrétaire, tous les écrits de l'Abbé avaient été soigneusement examinés par une commission constituée dans ce but par le Saint-Office. Ils avaient été déclarés exempts d'erreur - sauf sur un tout petit point que Monsieur de Nantes avait lui-même déjà détecté et corrigé.

De toute façon, s'il y avait des erreurs, l'Abbé ne pouvait pas les rétracter tant qu'elles ne lui avaient pas été signalées. Or cela n'a jamais été fait jusqu'à ce jour. La situation demeure donc sans changement.

Le rédacteur de la revue Je suis Français a parlé de "l'œuvre immense" accomplie par Monsieur de Nantes dans les domaines de la métaphysique, de la théologie et des sciences en disant que les écrits sur ces sujets sont des "monuments de réflexion et d'érudition", malgré leur ton quelquefois violent et leurs "excès de plume" (en français dans le texte).

L'idée de l'excommunier semble avoir été écartée. Peut-être trouvera-t-on quelque manière moins directe de le discréditer aux yeux de ceux - la plus grande partie des fidèles qui n'ont pas étudié la question depuis son origine. De fait, des essais ont été récemment tentés, à Paris et ailleurs, avec la connivence tacite du cardinal Lustiger, pour présenter l'Abbé et le mouvement de Contre-Réforme comme une secte tombée hors de l'unité catholique et désormais en dehors de l'Église. Dernièrement, les évêques catholiques romains d'Angleterre, dans leur réponse à un questionnaire reçu de Rome, avaient mis la CRC dans la liste des sectes et cultes religieux existant actuellement en Angleterre. Heureusement, l'intervention d'un évêque majeur qui connaissait la réalité des faits a suffi pour faire corriger cette erreur.

Il est difficile de voir comment finira ce procès. Jean-Paul Il ne semble pas plus disposé à céder que ne le fut Jean XXII. L'Abbé ne cédera certainement pas, à moins d'une déclaration "Infaillible" du Pape lui-même. Si le prochain Pape est un autre Jean-Paul Ier (Papa Luciani), on peut concevoir qu'il puisse insister sur le fait que les décrets de Vatican II doivent être soumis à un rigoureux examen afin d'être révisés ou réinterprétés pour que l'on soit assuré de leur conformité avec la doctrine traditionnelle. Car la racine du mal se trouve dans les décrets du néfaste Concile (en français dans le texte), comme l'appelle l'Abbé. Les défauts possibles des encycliques et allocutions d'un Pape éphémère sont de moindre importance.

Brocard SFWELL

 

Passio Christi

"Quand Jésus eut pris le vinaigre, il dit"Tout est consommé"; et baissant la tête., il rendit l'esprit."

Jean XIX, 30

Ce jeudi ler avril 2004, je déjeunai dans un établissement public de Sierre, hôte d'un agnostique violemment antichrétien. Il me dit en substance, à propos du film récent de Mel Gibson, "La Passion du Christ", que je verrai dans une semaine : "Qu'est-ce donc que ce Dieu qui se complaît dans l'abjection et l'humiliation ? Que veut-il nous apprendre ? Si le Christ avait été Dieu, il aurait rendu le mal impossible, il l'aurait vaincu ! Alors, nous pourrions croire en lui." La Passion du Christ était en somme, pour cet agnostique, un drame tout à la fois sordide et dérisoire, mais aussi parfaitement stérile, méprisable même en un sens.

Il ne faut pas trop vite se scandaliser de pareilles réactions païennes, aussi anciennes que les Évangiles du reste, qui rapportent cette réflexion des soldats romains participant à l'exécution et connaissant, par le titre de la Croix, ce que le Christ disait de Lui même:" Tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même." (Jean, XXIII, 37). Il n'y a, en effet, aux yeux du monde et pour un chef, pire situation que celle d'être convaincu d'impuissance devant tous. Les pires souffrances, même injustes, inspirent alors non pas tant la pitié que le mépris. Quel grand de ce monde dans l'échec, durable ou passager, n'a vécu ce genre d'épreuve ?

Les petites gens peuvent se montrer alors d'une cruauté sans nom. Les petites gens sont les ennemis les plus impitoyables du malheur des grands. Songez à la fin du roi Louis XVI, ou à celle de Mussolini. Peu importe que leurs mérites respectifs ne soient pas comparables. Je ne traite ici que d'un homme suprêmement fort et qui devient soudain suprêmement vulnérable. C'est ce passage de l'un à l'autre qui, aux yeux des non-chrétiens est à proprement parler impardonnable pour un homme tel que le Christ.

Gustave Thibon dans"L'échelle de Jacob" (1) commente ce type de réaction à travers celle, très proche d'esprit, des prêtres, des scribes et des pharisiens : "Descends de la croix et nous croirons en toi." (Matt., XXVII, 42) : "Sépare-toi de ta faiblesse. Fais éclater ton prestige! Comment, en te voyant si pauvre, pourrions-nous croire à tes dons ?", et il ajoute, étrangement : "C'est le cri éternel des pharisiens et le témoignage de leur éternelle méconnaissance du drame de ceux qui, nés pour donner à tous, ne peuvent rien pour eux-mêmes." Si le Christ n'avait été qu'un héros, ce commentaire serait parfaitement adapté. Mais l'analyse de Gustave Thibon n'en demeure pas moins très juste. Elle pose en termes vrais et rigoureux la nature du paradoxe chrétien. L'exemplarité divine fait incontestablement violence à notre nature et il faut, pour ne pas sombrer dans deux écueils opposés, l'incrédulité tragique ou le dolorisme morbide,, s'accrocher à toute l'orthodoxie de la foi. Car Dieu reste Dieu. Le Christ n'a pas diminué d'un iota sa puissance au Calvaire. Les évangiles relèvent même que le Christ est mort quand il l'a voulu, et que les hommes ne la lui ont pas infligée, parce qu'il n'était pas en leur pouvoir de le faire malgré le déploiement de toute leur puissance et aussi en dépit des manifestations visibles de l'impuissance divine face à la haine des hommes. Mais l'Évangile témoigne de la surprise des Romains à ce sujet, tout de même, et ce constat évangélique est significatif : "Mais Pilate, surpris qu'il fût mort si tôt ..." (Marc, XV, 44). Les deux larrons suppliciés avec lui n'étaient pas encore morts à l'heure où des soldats allaient leur briser les os.

Les Évangiles attestent donc, et sur la foi d'un témoignage païen, non chrétien seulement, que la mort même du Christ présente des signes d'étrangeté. Nous savons qu'elle fut décidée par le Christ et non par ses bourreaux ou par les Juifs. Là se cache la vraie signification du Sacrifice de la Croix : l'échec de la politique des hommes fut, au Calvaire, une fois pour toutes manifestée à tous, à toutes les créatures, visibles et invisibles, et c'est bien pourquoi le fait de refuser de croire à cet échec suprême et définitif est un péché, la désespérance, signe d'éternelle damnation. Le mystère de la Croix ne juge pas un Dieu dans l'esprit des hommes - c'est là toute la tragique illusion de ceux qui refusent de croire - ce mystère, central pour le christianisme, juge l'homme, tout homme, par sa confrontation à la vérité divine incarnée, une vérité qu'il n'attendait certes pas ainsi, mais qui est ainsi néanmoins...

Notre Dieu est un Dieu absolument vainqueur. Il nous l'a manifesté par charité, en vainquant la mort., d'abord en nous démontrant notre impuissance totale à la lui donner, ensuite, en ressuscitant. Mais l'homme semble se rire de tous les obstacles pour justifier son incroyance et se maintenir dans la fiction de son auto suffisance. Il y a quelques années à Uzès, j'entendais cette réflexion d'un auteur belge dans une pièce de sa fabrication "Lenclos ou la liberté" (2)

"Un jour étant enfant, j'ai même été punie

Pour une réflexion qu'on qualifie d'impie,

C'était Vendedi-Saint, tous de chagrin confits

De la crucifixion et de la mort du Christ

Se lamentaient tout haut; moi, au lieu de me taire

Je leur dis n'avoir pas de raison de s'en faire :

"Pourquoi, dis-je, ces pleurs ? Si vous savez déjà

Que dans deux ou trois jours il ressuscitera !"

Ce propos provoqua un tollé général,

Et l'on prophétisa que je finirai mal."

Vous surprendrais-je ? Je ne suis pas particulièrement heurté par de tels propos, que je ne goûte certes pas ! Il y a pas mal d'hypocrisie dans les lamentations de beaucoup les Vendredi saint, qui le niera ? La méditation de la Passion du Christ peut nous égarer, nous illusionner. Ce n'est pas l'Homme-Dieu qui est digne de pitié dans la Passion, c'est nous ! Le Christ lui-même le rappelait aux saintes femmes: "Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi, mais pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants." Le Christ fait ensuite allusion à la fin des temps, au jour du Jugement dernier (Luc, XXIII, 28). A aucun moment de sa vie terrestre, et surtout pas durant sa Passion, notre Dieu ne cesse d'être tout puissant. Il accomplit son œuvre de restauration de la nature humaine déchue, avec pour objectif prioritaire la gloire de son Père, et pour objectif second, le salut des hommes. Le Christ conduit sa Passion et, à aucun moment, ne la subit, même s'il ne se défend pas contre ses agresseurs. Celle-ci survient d'ailleurs à l'heure qu'il a voulue afin que nul ne doute qu'il est le maître réel de tous ces événements. Il est le Sacrifice parfait, et Son Père n'en agrée aucun autre après Lui. Il est le Prêtre par excellence et, désormais, il n'y aura, sur terre, qu'un seul Sacerdoce, le sien, continué jusqu'à la fin des temps. Sont-ce là des actes de vaincu, des preuves d'impuissance, des manifestations d'échec ? Cloué au bois de la Croix, le Christ conquiert encore l'un des deux larrons, crucifié avec Lui et qui, un instant auparavant, l'insultait !

La puissance des hommes ligués contre Lui ne parvient pas même à ce moment suprême de dépendance apparente à entraver son action salvatrice parmi nous. Le Christ est ostensiblement vainqueur jusque sur le Croix ! Quel héros de l'humanité a jamais fait mieux ? Et quelle puissance est dérisoire dans cette lutte entre Dieu et l'homme ? Quelle impuissance est plus glorieuse que la sienne ? Quelle victoire plus ignominieuse, plus honteuse que celle des Juifs ?

Quelle lâcheté plus manifeste que celle de l'occupant romain, impuissant à garantir une justice qu'il reconnaît pourtant par son gouverneur ? Jusqu'au bout, le Christ aura respecté la liberté des hommes, et cette liberté, livrée à tous les démons, n'aura pas suffi à modifier en rien le projet divin incarné, en rien entamé sa propre liberté ni amoindri sa propre puissance, absolument déconcertante pour l'homme. A un surcroît de violence barbare, de haine sans cause et d'orgueil aveuglé, chez l'homme, Dieu répond, curieusement, par un autre surcroît, incomparablement plus fort, de douceur et de délicatesse ultracivilisée, de lucidité infinie et d'humilité sans borne... "On peut comprendre, écrit Romano Guardini (3), en vibrant avec lui, le philosophe qui meurt pour son idée, le héros qui disparaît au fort de la bataille, César qui avant de monter au faîte de sa puissance, tombe sous les poignards des conspirateurs. Mais comment voir sans révolte le messager de la divine sagesse couvert de crachats, les soldats qui s'amusent cruellement avec lui, la mort qui lui est imposée non seulement pour supprimer sa vie corporelle, mais pour éteindre son honneur et sa mission ?"

Le déicide fut donc pour le vieil Israël et ses chefs un échec intégral. Tous les moyens de la puissance humaine étaient pourtant de son côté. Toute liberté lui a été laissée de déployer cette puissance jusqu'à son terme. Malgré cela, ces moyens et cette liberté pervertie ont tourné à l'avantage divin... Le Christ seul, par son seul pouvoir, anéantit toutes les illusions de la puissance des hommes. -

Et nous ne devrions pas croire en cet homme comme à un Dieu incarné ? Et nous devrions le confondre avec le fondateur de toute autre religion ? La Passion du Christ rend évidente l'extrême superficialité du modernisme, ses faux-fuyants irresponsables, sa lâcheté secrète. La Passion du Christ a confirmé dans notre histoire que la seule puissance réellement efficace vient de Dieu, qu'en face d'elle il n'y a rien que l'idéologie du laïcisme - improprement appelé laïcité - n'est pas seul ment "la peste des temps modernes", selon l'expression de Pie XI, mais l'expression même de la stupidité humaine, conséquence d'un aveuglement volontaire et obstiné dont nous ne pouvons, en fin de compte, que payer les frais (4). La Passion du Christ est autant un acte du Christ qu'un exemple à suivre... Le dolorisme est étranger à ce modèle, dans la mesure où la souffrance, toute souffrance acceptée, à l'imitation du Christ, comme participation à son unique Sacrifice, ne trouve jamais son principe dans un goût malsain du malheur ou de l'échec, au contraire tire son énergie, son courage, son endurance, sa patience, sa joie même, dans la certitude, donnée par la foi, qu'unie au divin Sacrifice, la souffrance humaine en aura aussi les effets glorieux et divins. Si bien que toute ironie sur la Passion ne peut qu'être un blasphème pitoyable témoignant de l'extrême superficialité d'un regard mondain sur elle. L'Évangile relate celui du roitelet Hérode, devant qui le Christ ne s'émeut pas, il se tait... Et tout effroi devant son réalisme., aussi épouvantable soit-elle, est la manifestation, parfois à peine consciente, de notre terreur face à la toute puissance divine, une puissance qui nous déroute précisément parce qu'elle ne nous écrase pas, parait au contraire mettre à notre portée une victoire sur Dieu même.

L'homme a voulu défier Dieu, son créateur. Mais l'homme est dérouté par le défi que Dieu lui porte en retour du sien. L'homme croit anéantir Dieu et la réponse de Dieu est, d'une certaine manière, un oui effrayant à cet anéantissement ! Un anéantissement plus fort, plus grand, plus saint que celui qu'il imaginait dans sa méconnaissance de Dieu. Est-il donc une manière plus miséricordieuse, plus royale et plus simple de révéler à l'homme l'étrangeté absolue au mal de notre Dieu et la démesure du bien qui est en Celui qui l'assume gratuitement à ce point pour ceux-là mêmes qu'Il fit surgir du néant ?

Michel de Preux- Sierre, lundi saint 5 avril 2004

1) Ed. Arthème Fayard, Paris 1942, page 105

2) Hippolyte Wouters, Prologue; pièce éditée à Bruxelles en 2000, page 15.

3) "Le Seigneur", tome II, Vième Partie : Les derniers jours, chap. III : L'humilité divine, page 23 de l'éd. Alsatia, Paris 1945.

4) Ce thème du laïcisme est en réalité le plus significatif pour le témoignage chrétien en politique. Pratiquement tous les catholiques adhèrent actuellement à l'idéologie laïciste, même dans les milieux traditionalistes, où ils ne sont pas rares. Leur sens moral en politique s'en trouve gauchi et il s'éloigne du modèle évangélique. En effet, que constatons-nous ? Que ces témoignages se concentrent sur des thèmes particuliers qu'ils traitent sans jamais mettre en cause le principe du laïcisme : l'avortement, les questions liées à l'homosexualité, l'euthanasie, la question du divorce étant d'ores et déjà abandonnée... Leur incohérence est manifeste. Pourquoi ? Parce qu'ils ne prennent plus, comme le Christ, véritablement au sérieux, la liberté des hommes et des sociétés. Ils escamotent le combat chrétien en politique. La Passion du Christ est une démonstration du contraire. Elle prend très au sérieux la liberté des hommes et c'est sans doute la raison pour laquelle le Christ n'est plus suivi par ses propres disciples ! Sa mère exceptée. Les chrétiens ont de la peine à reconnaître qu'en admettant le laïcisme moderne, les sociétés actuelles s'affranchissent réellement de la loi du Christ et qu'il n'y a pas de morale, même naturelle, imposable aux hommes par la voie démocratique. Dans une société sans Dieu, le droit de tuer et d'agir à sa guise ne sont plus réellement contestables quant au fond, puisque ce sont des hommes semblables à nous qui en décident majoritairement. Or la parabole de l'enfant prodigue donne une certaine vérité à la requête laïciste, et non seulement le Père, c'est-à-dire Dieu, ne s'oppose pas à la volonté d'émancipation de ce fils, mais il lui en donne les moyens en procédant à une avance d'hoirie à sa demande !

Les chrétiens n'ont donc pas, en politique, à s'opposer de manière partisane, à une évolution des mœurs qui n'est pas censée les concerner. Il est même à mon sens peu opportun, aujourd'hui, qu'ils le manifestent autrement que par leurs propres mœurs, forme de désapprobation non seulement théorique mais pratique, et même occasionnellement professionnelle. Or reconnaissons que sur ce terrain, les chrétiens sont aussi absents que les disciples du Christ durant sa Passion...

 

Père Arthur Lewis Lettre aux amis

Collège of St Barnabas Lingfiels

Surrey RH7 6UJ (Angleterre) Carême 2004

 

Pas d'obscurité aussi profonde

 

Le 29 janvier a été connu le rapport de Lord Hutbon. sur la mort tragique du Dr Irelly, le brillant savant nucléaire. Il a été émis le doute que notre gouvernement aurait été complice dans les pressions qui l'ont conduit au suicide.

 

Le lendemain le "Daily Telegraph" publiait un dessin montrant un couple regardant le paysage enneigé. "Regarde" disait l'un d'eux: "La neige vierge est presque aussi pure que Tony Blair". Cela donnait un peu l'impression d'un travail de blanchiment.

Avant la guerre d'Irak nous avons eu une démonstration anti-guerre d'un million de personnes, la plus grande démonstration de l'histoire d'Angleterre. Tony Blair est allé de l'avant malgré tout mais il ne fait plus la même unanimité maintenant qu'alors. Beaucoup d'entre nous ont eu le sentiment que pour l'occident "chrétien", lancer une attaque non provoquée contre l'Est islamique était une recette pour un désastre à long terme. Saddam Hussein était effectivement un tyran, mais pas le seul.

Il y avait, et il y a, un autre tyran pour l'installation duquel l'Angleterre est elle-même responsable: Robert Mugabé au Zimbabwé.

Ceux d'entre vous qui ont vu le Programme TV d'Hélène Anderson à la BBC le ler mars ou qui ont lu son article dans le "Telegraph" du même jour sauront la force et les faits non exagérés de la tyrannie de Mugabé. Elle n'est peut-être pas moindre que celle de Saddam Hussein. Pour la brutalité,les tortures et la terreur, il n'a guère de rival dans le monde d'aujourd'hui et un quart de la population du pays s'est enfui. Le Zimbabwé est aujourd'hui dans les griffes d'une forme extrême du marxisme.

Mugabé était connu comme un marxiste lors de l'élection de 1980 qui l'a porté au pouvoir, et il a utilisé un système très peu discret d'intimidation pour assurer son "élection". Depuis lors il n'a pas cessé de pratiquer le programme marxiste standard, commençant par la douceur et la clarté pour évoluer vers la barbarie difficilement imaginable d'aujourd'hui.

Et le fait est que c'est le gouvernement anglais qui l'a mis où il est. Le Ministre des Affaires Etrangères de l'époque, Peter Carrington, donna une promesse explicite à la Commission Electorale (dissoute plus tard) selon laquelle aucun parti procédant à des intimidations ne serait autorisé à se porter candidat: et il continua d'ignorer l'avalanche de preuves des tactiques de terreur que Mugabé et son parti utilisaient à ce moment. "C'est l'Afrique" disait-on. Un immense enthousiasme a effectivement suivi l'accès au pouvoir de Mugabé. N'était-il pas Noir? Et ne promettait-il pas la terre?

La réalité, même les plus aveugles peuvent la voir maintenant. L'Angleterre a passé de l'autre côté, fournissant une aide alimentaire comme elle peut. Saddam Hussein a souffert de notre courroux, mais pas le tyran dans les bras duquel L'Angleterre a, en fait, jeté sa colonie peut-être la plus réussie.

La Rhodésie, brave et magnifique

La Rhodésie a certainement été l'entreprise coloniale la plus réussie des 19ème et 20eme siècles. Du fait que le gouvernement anglais n'a pris aucune part dans l'acquisition de ce pays, aucune force militaire n'a été utilisée au départ. Le peuple anglais - sans implication du gouvernement - est simplement entré dans le Maschonaland sans tirer un coup de fusil et hissa son drapeau. Plus tard, l'annexion du royaume indépendant du Matabeleland eut lieu seulement pour défendre le peuple Shona, peu nombreux, très dispersé et pacifique qui était très souvent attaqué sauvagement et ses habitations pillées.

En quelques années le pays a été équipé par la Compagnie anglaise d'Afrique du Sud de routes et de chemins de fer et de fermes tirées de la jungle, et plus tard d'aéroports. Des écoles et des hôpitaux ont été construits (principalement par des missionnaires) et la population a eu la possibilité de devenir chrétienne. De nombreux indigènes étaient aussi dévoués que les missionnaires qui consacraient leur vie au peuple africain. Le pays et le peuple ont été transformés d'une manière spectaculaire pratiquement sans violence. Mais le gouvernement britannique était très peu impliqué dans tout cela jusqu'en 1923, quand il fut décidé que ce nouveau Pays deviendrait une colonie du royaume d'Angleterre. Le gouvernement britannique continua de ne rien faire pour l'aider - jusqu'à ce qu'il le remette en 1980 au "gouvernement de la majorité africaine."

La Rhodésie n'était pas parfaite ni entièrement chrétienne. Aucune entreprise humaine ne l'est jamais ou peut le rester toujours. Les ''libéraux'' gémissaient et se plaignaient de la façon dont étaient traités les Africains, assez souvent avec raison. Ils ont obtenu leur propre voie. Que Dieu leur pardonne et aide leurs victimes.

Certains d'entre vous ont lu mon livre ''Too Bright the vision?''(1992) et savent quelque chose de la Rhodésie que Gladys et moi avons expérimentée pendant 22 ans. Je n'ai qu'un regret au sujet de ce livre. j'avais présenté Didymus Mutasa, actuellement l'un des membres les plus importants du bureau politique de Mugabe, simplement sous le nom de "Thomas". Au moment où j'écrivais (il y a environ 12 ans), j'avais la fausse impression qu'il allait se tourner vers une meilleure vie. J'ai pensé: ''Donne-lui une chance'', et glissé sur sa jeune immoralité et ses atteintes continuelles à la morale publique. J'étais prêtre en charge de la Mission St Faith à Rusape quand Mutasa y était un écolier. Il a complètement embobiné l'évêque d'alors et arriva à un cheveu de me faire chasser du diocèse et du Pays. (J'ai refusé de démissionner et défié l'évêque de me congédier).

Ceux d'entre vous qui ont encore le livre trouveront Mutasa beaucoup atténué mais sinon l'histoire véritable aux pages 119 et suivantes. Dans aucun autre cas je n'ai modifié les faits. La vérité c'est que déjà à la fin des années 50 la pourriture était au travail pour démolir la Rhodésie et établir le "paradis" marxiste d'aujourd'hui. Mutasa était très bien appuyé par la direction blanche de la St Faith Mission Farm, qui n'était pas consacrée à l'évangélisation mais à la vision libérale de la collaboration - mais seulement avec ceux qui partageaient les mêmes idées ! -et avaient l'entier soutien du diocèse du Mashonaland.

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R.P. Arthur Lewis

 

Pas de résignation face à l'Union européenne

Le moment est mal choisi pour relancer le débat sur l'adhésion à l'UE, car on ne saurait prendre une telle décision par pure résignation. Il importe par ailleurs de ne pas passer sous silence - le débat est actuel! - les implications qu'une adhésion aurait sur les finances publiques.

Alors que les négociations entre la Suisse et l'Union européenne restent au point mort, les responsables de L'UE et de certains de ses États membres tiennent apparemment à nous rappeler leur puissance et exercent des pressions plus ou moins explicites pour faire plier la Confédération. Leur objectif concret, dans l'immédiat, est que la Suisse ratifie l'accord déjà signé sur la fiscalité de l"épargne, par lequel elle s'engage à prélever un impôt à la source sur les comptes des citoyens européens et à en reverser le produit aux pays membres de l'UE. Il est possible d'y voir aussi, de manière plus diffuse, un manque de compréhension envers notre non-appartenance au «club» européen et envers la voie bilatérale que nous avons choisie, ainsi qu'une irritation vis-à-vis de notre secret bancaire.

La réalité est que la Suisse, membre ou non de L'UE, représente un enjeu financier et politique considérable. L'accord sur la fiscalité de l'épargne rapportera à l'Europe les trois quarts d'un impôt de 35% sur les intérêts bancaires versés à ses ressortissants dans notre pays. La contribution helvétique à l'élargissement de l'UE pourrait atteindre plusieurs centaines de millions de francs par année. Enfin, une éventuelle adhésion de la Suisse à l'UE signifierait pour cette dernière un apport financier de plusieurs milliards de francs par année. Ceux qui affirment que l'Europe n'a pas besoin de la Suisse et que c'est la Suisse qui a besoin de l'Europe se trompent sans doute un peu... A ces arguments sonnants et trébuchants vient s'ajouter le fait que la Suisse, en se cherchant une voie indépendante au sein du continent, risque de donner un «mauvais» exemple à d'autres États.

Il est donc compréhensible - à défaut d'être admissible - que les États européens, dans le cadre de négociations délicates où la Suisse défend pied à pied ses intérêts, se laissent aller à quelques pressions pour intimider l'adversaire. Il est en revanche regrettable qu'en Suisse même, des personnes se laissent impressionner par ces manœuvres. Ces derniers temps en effet, on entend beaucoup de personnalités, politiciens, hauts fonctionnaires ou représentants de l'économie privée émettre plus ou moins ouvertement l'idée que la position de la Suisse est minable à terme et qu'il faudra tôt ou tard se résigner à une adhésion. Certains vont plus loin et considèrent la position helvétique comme immorale et indéfendable, justifiant ainsi les pressions européennes. Ces déclarations sont rapportées avec une satisfaction manifeste par une grande partie de la presse et, de manière plus générale, par tous les europhiles déçus de la voie choisie par les Suisses.

L'idée d'une adhésion résignée à une Europe qui ne nous laisse le choix qu'entre la soumission ou l'hostilité est assez éloignée de l'enthousiasme que l'on a connu il y a quelques années! Surtout, il faut rappeler qu'une adhésion à l'UE dans les circonstances actuelles nous placerait dans une position de faiblesse par rapport à nos partenaires européens. Les personnes qui, au-delà de leur amour-propre, se soucient véritablement de la prospérité de la Suisse ne peuvent que s'en inquiéter. Elles doivent savoir par ailleurs qu'une adhésion à l'UE coûterait plusieurs milliards de francs à notre pays et que cela aurait certainement des répercussions sur notre niveau de vie. A ce propos, il est étonnant de voir certains gouvernements cantonaux militer contre toute baisse d'impôt en invoquant un fédéralisme fraîchement découvert et une croissance des recettes insuffisante à leurs yeux, et plaider simultanément pour une adhésion à l'UE qui leur coûterait cher à la fois en ressources financières et en souveraineté politique.

Enfin, il ne faut pas se leurrer sur la place des petits pays au sein de l'UE. On a déjà constaté à plusieurs reprises avec quelle suffisance les grands États qui mènent l'Europe ont le réflexe de mettre au pas les autres membres lorsque surviennent des conflits d'intérêts. Les pressions exercées sur la Suisse renforcent cette image peu attrayante de l'Europe de Bruxelles. Imaginer que notre position se révélerait beaucoup plus confortable à l'intérieur de l'UE et qu'un droit de co- décision nous permettrait de défendre efficacement nos intérêts relève de l'angélisme.

 

(PGB)

 

 

Nouvelles de l'UNEC

- IRLANDE: On reste abasourdi devant la dépêche suivante tombant sur les téléscripteurs le 31 janvier:

"Dublin. Une commission gouvernementale qui enquête sur les abus sexuels et physiques commis depuis des décennies dans des institutions dirigées par l'Église catholique irlandaise, a reçu plus de 1700 plaintes. Elle devrait prendre en compte les rumeurs incontrôlables qui circulaient dans l'opinion et les médias. C'est pourquoi elle fut mise en place en l'an 2000 par le Premier Ministre Bertie Ahern, afin de poursuivre d'une manière rigoureuse une enquête sur des abus commis entre 1936 (!) et 1999 dans des écoles, orphelinats, hôpitaux et autres établissements pour handicapés, dirigés par l'Église mais financés par l'Etat. Un rapport intérimaire de 442 pages publié le vendredi 30 janvier a donné la mesure de la tâche qui attend les enquêteurs: 1712 plaintes ont été enregistrées, dont 27% de femmes, visant 1195 agresseurs présumés dans 267 institutions. Or la commission n'a pour l'instant mené une enquête complète que pour une seule institution, une ancienne école de Baltimore (sud-ouest) dirigée par l'ancien évêque local jusqu'à sa fermeture en 1950. Sans même attendre les conclusions finales de l'enquête, l'État irlandais et l'Église catholique ont commencé à verser des millions d'euros de dédommagements aux victimes de ces abus." (Source: infocatho 1.2.04). -

Nos commentaires

1) Les chrétiens, la bête immorale dans ce monde? Après les révélations du même genre orchestrées par les ennemis de l'Église aux Etats-Unis qui ne lui pardonnent pas sa position contre l'avortement, voici donc venu le temps d'abattre sa haine sur l'Église en Europe, en commençant par l'Irlande catholique.

2) Si l'on veut faire une enquête sur des plaintes concernant des crimes commis dès 1936, il faut donc des octogénaires comme témoins. Ce n'est pas une enquête morale, mais historique, avec tous les aléas liés à de telles études. Celles-ci seraient mieux menées par des historiens que par des commissaires du gouvernement.

3) Si la commission n'a complété qu'une seule étude sur une seule institution depuis 4 ans et encore sur une école qui a fermé ses portes depuis 54 ans, il faudra donc, au même rythme, 4 x 267 ans d'étude = 1068 ans pour clore cette enquête. Des dizaines de générations de commissaires pourront jouir de cette manne payée par l'Etat irlandais,en fouinant dans les bas fonds d'institutions religieuses d'antan, bref en écoutant "les rumeurs incontrôlables" de vieillards handicapés, morts depuis longtemps... Quand un État qui laisse 10.000 jeunes filles par an partir en Angleterre pour faire avorter leurs bébés, s'ingénie à accuser l'Église d'immoralité, il faudrait quand même un jour commencer à compter les cadavres des deux côtés pour faire éclater la vérité. - (ru) -

 

Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu (ndlr).